28 - On a marché sur la lune #1.
A croire que la tempête de neige de la dernière glaciation de
pas plus tard qu’il y a deux jours n’avaient jamais existé. Ici, dès qu’une
goutte d’eau traîne, on l’appelle Lost River.
Les rudes motards sont déjà réveillés et actifs, on entend ronfler les mécaniques dont ils vérifient la bonne santé. Le cri de Hardley-Davidson dans le matin calme. Quelque chose cloche pourtant dans ces bruits extérieurs mais nous nous occupons de notre café d’abord. Pour aller aux nouvelles, c’est très simple, ici comme dans tous le motels du pays du Vermont à la Californie, il suffit d’ouvrir la porte de la chambre et tout le monde est là, avec sa monture.
Je sors. Les motards sont bien autour de leurs machines, les uns me tournent le dos et les autres sont penchés sur les chromes et les câbles. Tous des costauds impressionnants à en croire les morceaux de gabarit que je peux voir. Je comprends alors ce qui clochait. En fait, je réalise seulement qu’en effet quelque chose clochait dans les bruits quand je n’avais même pas remarqué que quelque chose clochait. Décidément les préjugés ont la vie dure dans nos cervelles repliées.
Au bruit que fit ma porte, ils se sont redressés. Ce sont des filles, les rudes motards, tous, enfin toutes. ‘Aliénor est sortie à son tour et las a saluées d’un cordial bonjour qui visiblement les a surprises. Ce n’est pas ainsi que se comportent des bourges de Chicago, identifiés d’avance par le numéro de la plaque de notre engin rouge. Avec des têtes d’intellos, en plus.
Elles ont répondu d’un signe amical accompagné d’un grognement
comme seul l’ouest le vrai sait en produire, nous voici réconciliés. Comme
elles étaient prêtes, elles ont vissé leur casque et sont parties dans un grand
tremblement de quatre temps à bas régime.
à suivre.