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8 novembre 2005

21. La Pierre jaune #3.

21.3               Il y a longtemps, un grand volcan s’était installé dans les parages ;

puis il avait explosé, laissant un paysage ravagé, vitrifié, lavé. Mais on ne la lui fait pas, à la vie : elle prend son temps parfois, elle finit toujours par reprendre ses droits. Les petits mammifères qui avaient réchappé ont grandi, il n’y avait plus de grands reptiles pour les dévorer tout crus, et les forêts ont recommencé à escalader les pentes.

Le géant avait disparu, seuls demeuraient quelques sommets raisonnables ; les trous se sont remplis d’eau qu’on a appelés lacs. Les fleuves se sont frayés un chemin vers les plaines, creusant les grandes épaisseurs de cendres vertes, jaunes, orangées, en de profondes saignées multicolores, grondant leur hautes cascades. Parfois, comme pour se reposer, ils se prélassent en larges vallées douces et méandrent à n’en plus finir en se parsemant d’îles.

Les saisons ont succédé aux saisons pendant quelques dizaines de millions d’années. Je n’ai pas envie d’en faire le compte. Quand je suis arrivé sur place, d’autres montagnes entouraient l’emplacement du vieux chaudron, comme pour le surveiller de près. Et la neige fraîche qui avait failli me bloquer dans le col et me jeter dans le ravin avait pris soin, pour se faire pardonner, de tout souligner de pureté absolue.

Les gros mammifères, ils sont gros maintenant, bisons, orignaux, élans, antilopes, sont aussi étonnés que moi de ce deuil limpide hors de saison. Ils cherchent l’herbe tendre qui était là encore la veille au soir, enfin je rêve hier je broutais tranquille aujourd’hui je patauge, et laissent une trace sombre sur leur passage. Les vallées que les fleuves ont dégagées après le cataclysme, au fond plat et aux rythmes apaisés, sont sillonnées de ces lignes de vie, les mustangs ont recoupé les cerfs qui ont recoupé les bœufs.

Le monde a pris la pose, animaux et humains, et la neige sonne comme un cessez-le-feu.

Même les coyotes longent la route sans un regard pour la voiture éberluée qui s’arrête soudain, vite une photo. Parfois un nuage lourd descend au raz des pâquerettes et il n’y en a même pas, de pâquerettes, et déverse un voile de coton. Les lignes de vie s’effacent, les animaux se terrent et les humains s’enferment. Une heure plus tard, on ne voit plus rien de la route qui la distinguerait du reste de la vallée douce, sinon un alignement de caisses métalliques rutilantes. Maintenant qu’il n’y a plus rien à voir, les caisses repartent lentement en visant la caisse là devant, et attention à ne pas glisser.

Les animaux s’ébrouent après leur départ, et recommencent à tracer leurs lignes à la recherche de l’herbe perdue.

(à suivre).

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Commentaires
M
Cadbury mon bon .. ça va bien merci
A
Je n'ai pas tout compris de votre commentaire, Marie. Un peu assommé par ces derniers jours, je pense.<br /> A tout hasard, j'ai grossi les polices de tous les billets de la deuxième partie. J'ai même peur d'avoir trop grossi, les lettres envahissent les mots.<br /> Merci de me dire si tout va mieux maintenant.<br /> __________________________________________<br /> PS. Je ne sais pas qui est Monsieur Cad., avec ou sans suite.
M
J'ai besoin de tous les chapîtres de l'âme, les récits sont moins "commentables" que les réflexions et les pensées, si profondes soient-elles. Un tout petit peu plus grand Monsieur Cad.. Andrem, merci de votre compréhension.
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