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38. Saint-François et Saint-André #1.
Peut-on comprendre l’Amérique sans découvrir qu’elle s’anéantit dans l’océan Pacifique par une immense falaise imprenable, qui du Nord au Sud marque l’abolition de l’Occident ? Ils se sont rués vers l’ouest, les valeureux pionniers inconscients, ils se sont rués vers l’or, il ne reste d‘eux que les traces de leurs pas et quelques villes fantômes. Et une route sinueuse d’une beauté désespérée.
Même la tectonique des plaques s’en mêle, en assénant le coup fatal : la grande faille sournoise court invisible d’un bout à l’autre de ce bout, malheur à qui la franchit, malheur au petit bout de terre ose émerger un peu trop au-delà, un peu trop à l’ouest. Elle court dans les embruns, les brumes, les coups de vent ; quelques ports s’accrochent comme ils peuvent à la moindre anfractuosité, quelques bourgs se perchent sur de courtes plateformes en sursis, avancées provocantes ou chanceuses, vieilles coulées de lave oubliées là par l’érosion, et de doux rêveurs y vivent épris de solitude.
Des pirates armés jusqu’aux dents, au-delà de la limite, cherchent l’interstice où s’engouffrer ; mais il faudrait un miracle. Vous pensez bien que si un continent entier s’efface ici, il ne laisse pas une fissure apparente. Voit-on les fissures dans l’apocalypse ?
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