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7 décembre 2009

62. MONUMENT #3 - Un chapeau mexicain.

3.    Un chapeau mexicain.


Suis-je vraiment obligé ? Dois-je vous faire subir la punition de voir le rêve éclater sous la lapidation des mots descriptifs ? Lumière verticale, couleurs chatoyantes, chaleur rayonnante, piste balisée et chemin interdit, où se croisent catxcat et cavaliers, car il y a aussi un parcours pour cavaliers, ceux qui s’y croient d’ailleurs ils sont déguisés mais est-ce un déguisement ? Les touristes à cheval vont plus loin dans les recoins que les catxcat et c’est heureux, dans l’ombre plus chaude des falaises et de leurs témoins figés.

Je n’écrirai rien. Je te laisse rêvasser en Technicolor, mon fujichrome n’est pas à la hauteur ; je quitterai la vallée longtemps avant le coucher du soleil pour éviter le cliché, pour laisser le soin de graver leur silhouette à tous les pauvres cowboys solitaires de la terre. Je suis déjà à Mexican Hat, moi aussi je suis loin de mon foyer et j’ai un logement à trouver plus au Nord.

J’ai même eu le temps de faire ma petite halte en haut de la ligne droite, juste après le virage, pour le contre-champ en contre-jour.

Mexican Hat, petite bourgade de désert, avec supermarché, église, bar. Une seule rue pour tout plan de ville, la grand route où passe toute la circulation de la région, et sur la colline voisine un curieux rocher formé d’un petit caillou vertical supportant en équilibre un grand caillou horizontal arrondi et renflé en son milieu, une étrange cheminée de fée courte sur patte, on dirait un chapeau mexicain, on dirait une sieste.

Personne ne connaît Mexican Hat et pourtant tout le monde y passe. Que tu viennes du Sud du Nord, que tu partes vers l’Est racine vers l’Ouest le vrai, tu passes par Mexican Hat et la tête remplie de ce que tu vas voir ou de ce que tu as vu, tu ne vois pas Mexican Hat et son rocher haut de forme. Je suis passé par Mexican Hat et je ne me souviens de rien. Nous étions préoccupés de trouver la vieille piste poussiéreuse un peu plus au Nord qui devait nous offrir Monts et Merveilles le lendemain et surtout gîte et couvert le soir même. Piste secrète, non balisée, oubliée des rubans d’asphaltes rectilignes et triomphants.

Non, je n'écrirai rien. Faut-il dire qu’en cherchant la vieille piste tu as commis une série d’erreurs d’orientation à détruire ta réputation de navigateur infaillible, au lieu même du monde où il est impossible de confondre ouest et est, où perdre le nord une folie dure, ciel sans nuage toute l’année et routes perpendiculaires plus explicites que dix boussoles entrelacées ? Venant du Sud, pour partir à l’Est, tu tournes à droite un point c’est tout. Il n’y a qu’un seul carrefour à cinq kilomètre de la ville, le suivant est cent kilomètres plus loin, c’est simple. Tu as tourné à gauche, car la piste sur la gauche surgissait un peu avant la piste sur la droite, sans plus réfléchir qu’un catxcat sans chauffeur.

Décidément, tu ne veux pas de l’Est d’Eden.

Te voici face au soleil déclinant, il faut bien qu’il décline asteure, solstice ou équinoxe il est toujours un moment de déclinaison. Tu comprends ton erreur, mais c’est plus fort que toi, tu veux aller au bout de ton rouleau, ta pellicule, ton côté tournesol encore un peu plus à l’ouest, les yeux dans les yeux du soleil. Tu refuses d’entendre la raison qui te rappelle que dans ces lieux un détour ne signifie pas trois minutes de soleil en moins, mais trois heures ou trois jours. Tu veux voir le bout. Tu as vu un panneau où c’est écrit là-bas le bout. Alors tu y vas c’est tout.

...

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Commentaires
M
Et si le rêve se créait sous l'éclat des mots ?? j'aime beaucoup dans ce sens aussi. Un mexicain basané, allongé sur le sol ... tu entends ?
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